Belle Greene

Alexandra Lapierre.

Un jeune lieutenant américain se suicide, en 1943, à Londres, après avoir reçu une lettre de sa fiancée ...

Retournons en arrière.
C’est une histoire vraie. 
Début du 20ème siècle aux États Unis. L’esclavage, déjà partiellement aboli dans les états du nord, l’a été sur l’ensemble du territoire par Lincoln à la suite de la guerre de sécession (1861 1863). Le sud esclavagiste a été vaincu par le nord abolitionniste. Mais ce serait trop simple. 
A partir de 1877, et jusque dans les années 1960, les lois Jim Crow instaurent dans l’ensemble du pays une féroce ségrégation raciale et les anciens esclaves perdent tous les droits durement conquis. Une seule goutte de sang noir vous classe dans la catégorie des « gens de couleur » dont il vous est interdit de sortir.

C’est là que commence l’extraordinaire parcours de notre héroïne, Belle.
Hermione, la grand-mère, vit à Georgetown, quartier noir de Washington. Claire de peau et cultivée, elle reste très attachée  à la cause noire. Sa fille Geneviève vit proche des quartiers blancs à New York. Abandonnée avec ses enfants par Richard Greener, militant de la cause noire, avocat et rare diplômé noir de Harvard, elle rêve d’échapper à sa condition et, pour ses enfants, de franchir la barrière des races. A la mort d’Hermione, Belle  va lui permettre de réaliser ce rêve.
Ce qui exige une coupure totale avec le passé: un changement d’identité, une généalogie aristocratique et portugaise inventée, des déménagements. Les peaux se sont métissées depuis longtemps et peuvent donner le change, mais attention aux résurgences d’enfants trop bruns ou trop crêpus : par prudence mariages et procréation sont interdits. La peur d’être démasqué est constante, et on risque gros.
Belle Greener devenue Belle da Costa Greene, qui rêvait d’être bibliothécaire, va peu à peu se construire sur cette imposture une carrière extraordinaire au service d’un financier. Avoir une bibliothèque exceptionnelle et collectionner manuscrits et œuvres d’art, voilà l’idéal des plus grands banquiers et hommes d’affaires, quitte à piller les bibliothèques, salles de vente, musées et collections privées de la vieille Europe. C’est dans ces transactions au plus haut niveau qu’excelle Belle, qui navigue entre la réussite la plus éclatante et la crainte d’être ramenée à son origine...son frère, puis sa sœur se marient. Entre le risque de réapparition du stigmate racial, la réapparition et le chantage du père, elle jongle, jusqu’à quand?

Au delà du parcours d’une femme exceptionnelle par son talent, son audace, sa culture, c’est tout un pan de l’histoire américaine dont les conséquences se font encore sentir.